Expériences de traduction ...
Blog de Michel Politis, Professeur au Département de Langues Étrangères, de Traduction et d'Interprétation de l'Université ionienne (Corfou - Grèce)

Τετάρτη 14 Δεκεμβρίου 2016

Journée d’études: « Traduire l’illégalité », Lyon, 17 février 2017

Appel à communications
Journée d’études « Traduire l’illégalité »
Vendredi 17 février 2017


Organisée par le Centre de Recherche en Terminologie et Traduction (EA 4162)
et l’UFR Droit et Science Politique
Université Lumière Lyon 2
Maison Internationale des Langues et Cultures (MILC)


Une journée d’études autour des différents défis juridiques, traductologiques et terminologiques liés à la notion d’illégalité dans plusieurs langues est organisée le vendredi 17 février 2017 par le CRTT – Centre de Recherche en Terminologie et Traduction et par l’UFR Droit et Science Politique de l’Université Lumière Lyon 2.

A une époque où des phénomènes de société tels que la nécessité d’un statut juridique pour les lanceurs d’alerte, la corruption, le droit d’auteur, la question des réfugiés, ainsi que de nouvelles normes juridiques internationales telles que la responsabilité de protéger font la une des journaux, le concept d’illégalité est en train de modifier ses frontières et ses acceptions.

Le lanceur d’alerte :
Les nouvelles mesures législatives adoptées en France au sujet des lanceurs d’alerte posent les défis d’une métaphore juridique, ainsi que la question des limites de sa traduction dans d’autres langues et systèmes juridiques. Alors que, le 1 er mai 2016, dans son émission Kiosque, TV5 Monde dédiait une rubrique à ce phénomène sociétal sous le titre : « Les lanceurs d’alerte sont-ils d’utilité publique ? », la question de la définition du lanceur d’alerte se posait avec urgence et impliquait, outre la dimension juridique, un aspect moral, ce qui le place entre le principe de responsabilité 1 (Hans Jonas) et le principe de liberté dans la polis (Hannah Arendt). Le contexte socio-politique sert de toile de fond pour l’évolution de cette nouvelle réalité juridique, comme le montre Nicole-Marie Meyer dans son article « L’alerte éthique depuis 2009 » :
« En trente ans, les définitions du whistleblowing [littéralement, souffler dans le sifflet] se sont considérablement élargies. Les législations nationales et internationales ont évolué du fait de scandales publics liés aux crises financières, médicales et environnementales contemporaines, passant de l’alerte professionnelle à l’alerte civique, des risques comptables et financiers aux risques sanitaires et environnementaux, de la notion de fraude à celle de risque pour autrui. » i

La question de la traduction des termes whistleblowing, whistleblower en différentes langues se pose, ainsi, et entraîne une réflexion jurilinguistique contrastive sur l’emploi et la forme de ce nouveau syntagme juridique, tout en considérant le fait que l’éthique est une notion différente d’un pays à l’autre.

La corruption :
La corruption, avec son cortège de métaphores et euphémismes, représente un autre thème central de notre actualité. Se pose aujourd’hui la question de l’imaginaire qui est en train de se construire autour de ce concept juridique, et qui nous met face à une corruption « transfigurée » ou « revisitée » qui interroge les traducteurs confrontés à des systèmes juridiques et à des univers culturels différents.
La surmédiatisation de ce phénomène mène à des changements de perception et des glissements sémantiques, oscillant entre la désensibilisation et le sensationalisme. Le poids des mots reste une question ardente actuellement, de par la performativité de la parole qui « naît au ras du geste » (Paul
Ricœur). Spécialisations, déterminologisations, thématisations, métaphorisations, néologie accompagnent l’évolution de ce concept dans une société éminemment visuelle, où les aspects juridique et éthique de la corruption se trouvent, de manière attendue, sur le devant de la scène, alors que le pathos sous-tend et accompagne la déconstruction normative et morale.

Le droit d’auteur :
La question du droit d’auteur et de sa traduction soulève non seulement des problèmes d’ordre juridique mais aussi terminologique. En pratique, le terme droit d'auteur est souvent traduit copyright
et non pas author's right, ce qui n'est pas neutre sur l'image que l'on veut projeter de la matière : on
passe d'une protection de l'auteur à une protection de l'œuvre, même si ce n'est certainement pas voulu
par le traducteur. D'ailleurs, sur le droit d'auteur, et plus largement la propriété intellectuelle, il est
intéressant de relever d'autres variations terminologiques qui peuvent donner lieu à de nouvelles réflexions. A titre d’exemple, le syntagme droits voisins d'artistes-interprètes est traduit en anglais
américain tantôt par performing rights, tantôt par copyright ; le terme contrefaçon présente aussi deux
types de traduction, à savoir counterfeiting et IP infringement.

La migration :
Un autre thème central en cette période qui interroge le concept d’illégalité est celui de la liberté
de circulation, qui est aujourd’hui confrontée à des difficultés conceptuelles gravitant entre des
espaces sémantiques et de perception variés, et qui procèdent d’une heuristique de la peur et jusqu’au
concept du bonheur en tant qu’indicateur du développement humain 2 . Entre un agir qui ne peut être
aujourd’hui autre que communicationnel (Jürgen Habermas) et un principe de responsabilité (Hans
Jonas) qui est le nouvel impératif catégorique de notre monde pluri- et interculturel, nos sociétés en
contact se reconstruisent selon de nouveaux paradigmes, alors que les mots qui les parlent en sont les
fidèles témoins et fonctionnent comme des passeurs de sens et de réalités. La migration, qu’elle soit
économique, politique, culturelle ou environnementale, pose de nouveaux enjeux pour les interprètes
et les traducteurs, qui accompagnent les migrants dans leurs démarches administratives. Les
traductologues et les linguistes se trouvent confrontés à de nouvelles réalités discursives et de
nouveaux défis terminologiques qui mettent en paroles l’évolution de la société.

Les normes internationales :
Une réflexion traductologique pourrait également être révélatrice de la formation d’habitudes de
penser et des perceptions collectives, comme dans l’exemple de l’abréviation R2P (responsibility to
protect). Cette norme onusienne décrit un véritable parcours de reconnaissance depuis les années
1990, inscrivant dans la mémoire collective des perceptions variées, connotées négativement la plupart du temps et qui en retracent la métamorphose, traduites de l’anglais vers le français, par des avatars plus ou moins incongrus linguistiquement et juridiquement : l’« intervention humanitaire » ou
humanitarian intervention, « la guerre humanitaire » ou humanitarian war, « la guerre préventive » ou
preventive war, « la guerre juste » ou just war, « les guerres imposées » ou imposed war, « les guerres
par choix » ou wars of choice, le « droit d’ingérence » ou duty/right to intervene/to interfere/to
interference, right of intervention/right of humanitarian intervention, le « devoir
d’ingérence/d’intervention » ou obligation/duty to intervene/to interfere, duty of intervention,
responsibility for intervening. La sphère sémantique de l’« action sur » oscille entre l’euphémisme
« intervention » et l’affirmation de la violence – « guerre » – légitimée par le « devoir » qui devient
étrangement synonyme du « droit », un droit qui n’en est pas un.

Le Comité scientifique examinera les propositions de façon anonyme. Les communications
présentées feront l’objet d’une publication en ligne. Les propositions de communications devront être
transmises sous format Word (et non pas .odt) et contenir les informations suivantes : nom, prénom, institution et laboratoire de rattachement, adresse électronique, titre de la communication, résumé de
1500 à 2500 signes (espaces compris), à l’adresse : corina.veleanu@univ-lyon2.fr

Calendrier :
– Soumission d’une proposition d’une page : 15 janvier 2017
– Notification d’acceptation de la proposition : 22 janvier 2017

Comité scientifique :
Corina VELEANU, Maître de conférences, Faculté des Langues, Université Lumière Lyon 2
Marion CHARRET DEL BOVE, Maître de conférences, Faculté de Droit, Université Jean Moulin
Lyon 3
François MANIEZ, Directeur du CRTT, Professeur des universités, Faculté des Langues, Université
Lumière Lyon 2
Alexandre QUIQUEREZ, Vice-Doyen de l'UFR Droit et Science Politique, Maître de conférences en
Droit privé, Université Lumière Lyon 2
Vincent RENNER, Professeur des universités, Faculté des Langues, Université Lumière Lyon 2