Université Toulouse Capitole, 11 et 12 mai 2017
Centre Toulousain d’histoire du droit et des idées politiques et Centre de droit comparé de l’IRDEIC
Direction scientifique Marie Bassano, professeur d’histoire du droit et Wanda Mastor, professeur de droit public
Centre Toulousain d’histoire du droit et des idées politiques et Centre de droit comparé de l’IRDEIC
Direction scientifique Marie Bassano, professeur d’histoire du droit et Wanda Mastor, professeur de droit public
Problématique
Une deuxième série de questions, inévitablement liées à la première, concernent non plus l’objectif mais l’objet de la traduction. De ce point de vue, la distinction doit être faite entre la traduction des discours du droit et des métadiscours. La première revêt une importance fondamentale dans le cadre de systèmes juridiques inter ou supra-nationaux. Ne prenons que l’exemple d’une décision de la Cour européenne des droits de l’homme : elle doit être comprise par tous et si l’anglais est suffisant pour la circulation auprès des institutions politiques et judiciaires, il n’en va pas toujours de même pour l’auditoire universel. On ne compte plus les exemples où la traduction d’un terme ou d’un concept, au niveau d’une institution internationale, a été au cœur de vives polémiques. La traduction d’un texte doctrinal revêt a priori un enjeu moindre mais le choix du texte à commenter est néanmoins délicat. La posture du traducteur est scientifique mais aussi nettement subjective : comment expliquer à un éditeur l’importance du texte à commenter ? Doit-on partir justement d’un texte (par exemple, en raison de son retentissement dans le pays de sa production) ou d’un auteur dont on estime que la connaissance est indispensable ? Peut-on, ou doit-on traduire un texte qui l’a déjà été ?
Cette question renvoie à une troisième série de réflexions sur l’auteur de la traduction juridique. Doit-il être avant tout linguiste ou juriste ? Quel est le critère d’une traduction faisant « autorité » ? La spécialisation de son auteur ou la proximité de ce dernier avec l’auteur traduit ? La légitimité d’une traduction ne provient-elle pas d’un traducteur qui jouirait de ces deux qualités cumulatives, à l’instar de Charles Eisenmann traduisant Hans Kelsen ? Existe-t-il, pour les traductions doctrinales, une distinction entre les « officielles » et les autres, comme c’est le cas par exemplepour les traductions des Constitutions étrangères ? Enfin, l’auteur qui se spécialiserait dans destraductions sans être traducteur de profession fait-il œuvre scientifique ? Une traduction mérite-t-elle d’être valorisée dans la carrière d’un juriste ?
Ce colloque se propose d’aborder ces séries de questions, en mêlant interventions académiques d’historiens du droit et comparatistes et retours d’expérience de traducteurs en présence des auteurs traduits et d’éditeurs de traductions, lesquels sont également animés par des logiques économiques.
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Le droit a son propre langage, et même plusieurs. Comme le regrettait Michel Villey, « même entre juristes le malheur est que nous habitons une tour de Babel. En fait, il y a historiquement, non pas un langage du droit, mais plusieurs, et des charabias ». La circulation des droits d’un pays à un autre, d’une époque à l’autre, suppose la possibilité de pouvoir saisir ce droit voyageur. Pour traverser les frontières et les âges, il doit être traduit.
Mais que traduit-on lorsqu’on traduit le droit ? La différence fondamentale formulée par Ferdinand de Saussure – entre sens (contenu intrinsèque du terme) et valeur (contenu du terme tel qu’il résulte des relations qu’il entretient avec d’autres termes relevant d’un même système linguistique) d’un mot – prend une dimension toute particulière dans le domaine juridique : ce qui y distingue le sens de la valeur n’est pas seulement l’intégration du mot dans un système linguistique donné, mais aussi et surtout dans un système juridique spécifique. La question de la traduction juridique s’entend donc en réalité à plusieurs niveaux. Il n’y est pas seulement question de traduire les mots du droit ; s’y mêlent aussi la question de la possibilité de traduire la distance qu’entretient la langue juridique avec la langue commune au sein de chaque système linguistique, et celle de la capacité à transcrire les réalités juridiques inhérentes à un système juridique dans des langues par lesquelles se pensent et se formulent des règles auxquels ces réalités sont étrangères.
Historiens du droit et comparatistes sont sans cesse confrontés à cette passionnante mais redoutable difficulté. L’ambition du présent colloque est de questionner les pratiques multiples de la traduction juridique, à la fois dans leur épaisseur historique et dans leur amplitude transfrontalière.
Mais que traduit-on lorsqu’on traduit le droit ? La différence fondamentale formulée par Ferdinand de Saussure – entre sens (contenu intrinsèque du terme) et valeur (contenu du terme tel qu’il résulte des relations qu’il entretient avec d’autres termes relevant d’un même système linguistique) d’un mot – prend une dimension toute particulière dans le domaine juridique : ce qui y distingue le sens de la valeur n’est pas seulement l’intégration du mot dans un système linguistique donné, mais aussi et surtout dans un système juridique spécifique. La question de la traduction juridique s’entend donc en réalité à plusieurs niveaux. Il n’y est pas seulement question de traduire les mots du droit ; s’y mêlent aussi la question de la possibilité de traduire la distance qu’entretient la langue juridique avec la langue commune au sein de chaque système linguistique, et celle de la capacité à transcrire les réalités juridiques inhérentes à un système juridique dans des langues par lesquelles se pensent et se formulent des règles auxquels ces réalités sont étrangères.
Historiens du droit et comparatistes sont sans cesse confrontés à cette passionnante mais redoutable difficulté. L’ambition du présent colloque est de questionner les pratiques multiples de la traduction juridique, à la fois dans leur épaisseur historique et dans leur amplitude transfrontalière.
Sans hiérarchiser les approches, une première série de questions pourraient être relatives à l’objectif de la traduction. A priori, la traduction a pour mission première la connaissance. Traduire pour faire circuler, faire circuler un texte ou un auteur, pour mieux l’analyser, l’encenser ou le contredire. Mais l’objectif peut être autre, assumé ou moins évident à percevoir : la traduction peut s’enrichir d’accents militants, lorsqu’elle permet de mieux asseoir une position doctrinale dominante. Il est assez significatif de remarquer qu’en France, la plupart des théoriciens étrangers traduits en français sont les tenants de la théorie réaliste de l’interprétation. De même, une logique inconsciente à l’œuvre chez une partie des historiens du droit les conduit depuis une cinquantaine d’années à ne plus traduire certains termes (auctoritas, potestas, libertas, imperium, …), laissant au lecteur le soin d’appréhender lui-même la distance qui pourrait exister entre ces termes et leur éventuelle traduction. Le discours, et la force de la démonstration, sont-ils transformés par de telles pratiques ? A ces questions sur l’objectif de la traduction se rattachent donc presque naturellement celles portant sur les lecteurs et utilisateurs : à qui est destinée la traduction ? Le traducteur s’adresse-t-il à un lectorat monolingue ou polyglotte, connaisseur ou ignorant du système juridique et historique considéré ? La réception éclairée et efficace de la traduction ne conduit-elle pas parfois à une enclosure du lectorat ?
Une deuxième série de questions, inévitablement liées à la première, concernent non plus l’objectif mais l’objet de la traduction. De ce point de vue, la distinction doit être faite entre la traduction des discours du droit et des métadiscours. La première revêt une importance fondamentale dans le cadre de systèmes juridiques inter ou supra-nationaux. Ne prenons que l’exemple d’une décision de la Cour européenne des droits de l’homme : elle doit être comprise par tous et si l’anglais est suffisant pour la circulation auprès des institutions politiques et judiciaires, il n’en va pas toujours de même pour l’auditoire universel. On ne compte plus les exemples où la traduction d’un terme ou d’un concept, au niveau d’une institution internationale, a été au cœur de vives polémiques. La traduction d’un texte doctrinal revêt a priori un enjeu moindre mais le choix du texte à commenter est néanmoins délicat. La posture du traducteur est scientifique mais aussi nettement subjective : comment expliquer à un éditeur l’importance du texte à commenter ? Doit-on partir justement d’un texte (par exemple, en raison de son retentissement dans le pays de sa production) ou d’un auteur dont on estime que la connaissance est indispensable ? Peut-on, ou doit-on traduire un texte qui l’a déjà été ?
Cette question renvoie à une troisième série de réflexions sur l’auteur de la traduction juridique. Doit-il être avant tout linguiste ou juriste ? Quel est le critère d’une traduction faisant « autorité » ? La spécialisation de son auteur ou la proximité de ce dernier avec l’auteur traduit ? La légitimité d’une traduction ne provient-elle pas d’un traducteur qui jouirait de ces deux qualités cumulatives, à l’instar de Charles Eisenmann traduisant Hans Kelsen ? Existe-t-il, pour les traductions doctrinales, une distinction entre les « officielles » et les autres, comme c’est le cas par exemplepour les traductions des Constitutions étrangères ? Enfin, l’auteur qui se spécialiserait dans destraductions sans être traducteur de profession fait-il œuvre scientifique ? Une traduction mérite-t-elle d’être valorisée dans la carrière d’un juriste ?
Ce colloque se propose d’aborder ces séries de questions, en mêlant interventions académiques d’historiens du droit et comparatistes et retours d’expérience de traducteurs en présence des auteurs traduits et d’éditeurs de traductions, lesquels sont également animés par des logiques économiques.
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Responsables scientifiques :
Marie Bassano, Professeur d’histoire du droit
et
Wanda Mastor, Professeur de droit public
Marie Bassano, Professeur d’histoire du droit
et
Wanda Mastor, Professeur de droit public
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